Hello, c’est Guillaume (d’Angougoulême), étant d’un naturel râleur, voici trois pages word de ronchonnement.
Si je n’ai pas écris plus tôt, c’est pour au moins deux raisons. La première c’est l’impression de n’avoir rien à dire (et ouais Montréal, c’est pas non plus le grand dépaysement) et la seconde, c’est que le retour aux études universitaires, a dans un premier temps été déprimant, pour devenir simplement chiant, avant d’être (au bout de trois mois) supportable (heureusement parsemé de quelques moments de grâce : je crois avoir à peu près compris la Métaphysique des Mœurs). D’ailleurs, à la façon d’un devoir sur la question des intermédiaires dans l’histoire chrétienne, voici mon plan en trois parties.
Dans un premier temps je parlerais de mes impressions pendant mon semestre d’étude à l’université de Concordia où je me suis retrouvé, suite à quelques désagréments administratifs, à étudier l’éthique, l’histoire de la Chrétienté et celle de l’Hindouisme (j’ai lâché la logique déductive après le premier cours).
Dans un second temps, je m’intéresserais à la ville de Montréal qui, si elle n’est probablement pas une ville aussi contrastée que Shangaï, présente comme beaucoup de villes occidentales, avec ses spécificités, de nombreux paradoxes.
Enfin, je ferais un bref résumé des différents musées/galeries/centres d’art que j’ai eu l’occasion de visiter.
Concordia donc. Si j’ai choisi cette université, c’était, d’une part pour améliorer mon anglais et d’autre part, pour observer l’enseignement artistique dans une école à la frontière des idéologies européenne et nord américaine.
En ce qui concerne l’apprentissage de l’Anglais, je ne peux que déconseiller à ceux que ça intéresserait le choix que j’ai fais. Au Québec, presque tout le monde parle français, donc on le parle 90% du temps. Il n’y a donc qu’à l’université que j’ai eu l’occasion de pratiquer, et cette pratique est essentiellement celle de la compréhension orale et écrite : difficile de briser la glace avec votre voisin de tablée dans un amphithéâtre (essayer de chuchoter en anglais quand vous avez mon niveau) ou de vous intégrer dans une faculté de 46 000 étudiants quand vous en chier pour simplement demander votre chemin. Mais, pour être tout à fait honnête, je pense être aussi responsable, rapidement replié sur moi même, je n’ai pas cherché à participer à la moindre activité en rapport avec l’université (pourtant il y avait une asso’ de râleurs (rares) qui cherchait à désengager Concordia de ses financements dans les industries pétrolières).
Coté pratique artistique et enseignement, comme je l’ai précisé, l’université m’a refusée l’accès aux cours que je désirais, aussi, difficile d’émettre un jugement de ce coté. En revanche, je dois admettre que les cours choisis après coup m’ont (exemption fait du système tout à fait rigide devoir/notation) été plutôt agréable. Pour des cours « de bases », dispensés en quatre mois, il faut bien avouer que le programme est velu :
Pour l’histoire des religions, (Chrétienté et Hindouisme donc), un bon gros résumé historique et théologique de ces « deux » religions que l’on voit très rapidement, mais surtout complètement.
En philosophie, (Éthique), c’est encore pire, puisque que l’on va d’Aristote à Philipa Foot en passant par Kant (de la difficulté à suivre un cour de philo’, même élémentaire, en anglais, j’en rigole encore). Heureusement, on trouve les traductions françaises pour les classiques, mais pour les articles universitaires, multipliez le temps de travail par trois.
A propos de temps de travail, je pensais avoir fait une bonne affaire en tassant mes cours sur deux jours, que nenni, les journées sont longues et ne représentent que 25% du temps de travail total, le reste étant partagé entre les lectures, les devoirs ( j’adore ) et les révisions (c’est ce que je préfère). M’enfin, au bout du compte, j’ai emmagasiné du savoir (l’être par le savoir hein), plus ou moins en adéquation avec mon travail plastique, donc, c’est pas une perte sèche. Mon plus gros regret restant quand même 4 mois sans peinture ni scie circulaire.
Montréal, Montréal, Montréal. On est loin de l’utopie que j’ai pu me figurer et dont les échos emballés traversent l’atlantique. Véritable mélange d’amour et de haine en ce qui me concerne, et on va commencer par ce qui m’a agacé pour terminer sur une note positive.
Rapidement : c’est une grande ville occidentale comme il en existe plein. Avec son centre ville de tours de verre (dont de nombreuses sont en construction, comme quoi, il y a croissance haha), anxiogène au possible, peuplé de costards qui marchent au pas, café Tim Hortons™ à la main. Sa proche banlieue qui se gentrifie largement, les prolos faisant place aux bobos, (dans une atmosphère de stagnation intellectuelle et d’absence de volonté révolutionnaire où l’on se tape sur l’épaule en se félicitant de la dernière expo’ à thématique sociale tout en appelant un uber). Et bien sûr comme dans chaque grande ville un nombre ahurissant de laissé-pour-comptes, dont on a du mal à deviner l’avenir quand la météo annonce des températures inférieures à -20°C. Le pire étant la sensation de participer de tout ça, et de baisser les bras face une actualité qui enchanterait le moi nihiliste de 16 ans. Plus sérieusement, cette actualité (mondiale s’entend) a réussi pour la première fois à m’effrayer dans ma vie d’homme blanc hétéro occidental et bourgeois.
Heureusement, Montréal reste une belle ville, déjà, un enchantement à chaque saison, fin de l’été, automne, et hiver. Les lumières sont superbes et les couleurs fantastiques. Ensuite, il faut bien admettre qu’il y fait bon vivre, la scène culturelle est extrêmement active, on trouve facilement des produits frais (même s’il faut bien deux mois pour changer ses habitudes alimentaires, je tuerai pour un morceau de conté 18 mois), et c’est particulièrement agréable de simplement marcher tout droit, la ville étant très étalée, prévoir de bonnes chaussures. Mon coin préféré restera sûrement le Silo 5, au vieux port, monument de la friche industrielle. Enfin, et probablement le point le plus positif de cette ville, les gens sont cool. Mais pas juste cool, cette ville est détendue sur toutes les questions qui fâchent sérieusement la France. Pas un regard de travers en 4 mois, presque pas d’incivilités, ethnies et religions respectées même quand montrées ostensiblement (voiles, turbans, croix, tout le monde s’en fout), et Lola pourra témoigner d’un harcèlement de rue moins récurent. Si ce dernier points ne me concerne évidement pas directement, il participe néanmoins à l’ambiance de la ville qui elle est tout à fait sensible.
Pour finir, un petit récap’ avec Lola, des centres d’art/ musées/ galeries que nous avons visité. Je ne prétends ici à aucune forme d’objectivité ou de critique construite.
-Le Belgo est un grand centre d’art en plein centre ville, dans lequel de nombreuses galeries ont élu domicile. (Outre les galeries, c’est un vrai lieu de vie où l’on croise aussi bien des ateliers d’artistes (peintres, au hasard) que des studios de danse).
Nous nous y sommes rendus une première fois, pour la galerie B-312, qui présentait Mathieu Latulippe et Amélie Laurence Fortin. Si j’ai quasiment effacé de ma mémoire le travail du premier, celui de la seconde, « cent vingt-cinq heures », se composait d’un polyèdre noir de la forme d’un mont, suspendu, duquel s’écoule des billes de verres, normalement pendant une durée, de 125 heures.
La seconde fois, c’était à l’occasion d’une « soirée Belgo », sorte de vernissage collectif où un grande partie des galeries du centre sont ouvertes, l’occasion de voir beaucoup (trop) de choses. On retiendra surtout une discussion avec un des artistes (Max Wright), qui loue un atelier dans le bâtiment et qui nous a parlé un peu de sa démarche (autrement plus intéressant qu’un cartel).
-Regroupement Pieds Carrés, dans le Mile-end, où l’on retrouve pas mal de Centres d’Artistes autogérés.
Chez Diagonale était présenté le collectif We Make Carpets, qui, use de matériaux produits en quantité industrielle (élastiques colorés, trombones etc…), pour fabriquer comme leur nom l’indique, tapis et tapisserie. Sans prétentions, les pièces en jettent visuellement, l’entrelac d’élastiques cloués aux murs était vraiment chouette.
Le centre d’art et de diffusion CLARK, on l’on pourvait circuler autour de deux grands polyedres, plongés dans la pénombre de Jen Aitken, ainsi que «Of all the waters bodies, I only know my own », serie de photos par Michelle Lacombe
-La Fondation pour l’art Contemporain DHC/ART, présentait Wim Delvoye. De tout les artistes de l’école de la finance et du cynisme, il reste celui qui arrive encore à me faire marrer, et dont certaines pièces sont définitivement élégantes. Pour le reste vivement que leur règne prenne fin.
-Nous avons visité le Musée d’Art Contemporain à l’occasion de la Biennale de Montréal « Le grand balcon ». Comme d’habitude, trop de choses à voir, avec des cartels volontairement incompréhensibles, où rien ne surnage véritablement faute à l’absence de cohérence scénographique (tout s’enchaîne puis c’est tout). Temple du « t’es trop con pour comprendre », mais on savait à quoi s’attendre. Après avoir fait le tour des trouzmilles artistes en une heure, on s’est quand même arrêtés une bonne demi-heure devant un reportage/film documentaire vraiment bien filmé d’Éric Baudelaire : « Prélude à AKA Jihadi », (une réflexion sur le djihadisme à partir du cas d’un jeune Français parti combattre en Syrie en 2012 et condamné, en janvier dernier, à neuf ans d’emprisonnement.)
-Nous sommes allés à « la Fonderie Darling», centre d’arts visuels, à l’occasion d’une discussion avec les artistes Stéphanie Lagarde, Claudia Passeri et Sashikant Thavudoz, en résidence internationale. L’ambiance était décontractée (bière gratuite) et intimiste (nous étions 15, artistes inclus). Les trois artistes ont fait une petite rétrospective de leurs travaux actuels et en cours. Les deux premières, l’une française et l’autre originaire du Liechtenstein, nous ont prouvé que la sur-intellectualisation des pratiques artistiques ne mène à rien, avec des présentations reposant essentiellement sur des mots clefs vides de sens (« protéiforme », « historicité » et « surface pelliculé » jusqu’à plus soif). Heureusement, le dernier, venu d’Inde, avait une démarche beaucoup plus sensible et formelle et son boulot typé land-art était vraiment intéressant, avec entre autre une intervention dans une carrière de marbre en Inde (rien que les photos de l’endroit étaient dingues).
-Musée national des beaux-arts du Québec (à Québec) : Deux parties, une moderne et une contemporaine. La section moderne était particulièrement intéressante, autour de quatre monographies d’artistes (Fernand Leduc, Jean-Paul Riopelle, Jean Paul Lemieux, Alfred Pellan), l’occasion de constater que les modernes Québécois n’ont pas échappés aux mouvements continentaux : cubisme, surréalisme, action painting, abstraction géométrique, tout y passe. Mention spéciale à Fernand Leduc, qui non content d’avoir la même bouille que Gottfried Honneger, a eu une période monochromique avec au milieu de laquelle un blanc sur blanc.
Coté Contemporain, comme d’habitude c’est la foire-fouille, tout se mélange, mais quand même quelques belle pièces, notamment deux grands disques dans des teintes grises/brunes de Claude Toussignant.
-Sur une proposition de Michelle Héon en septembre, nous nous sommes rendus à Articule, centre d’art dans le Mile-End, afin d’assister à une rencontre/discussion avec l’artiste Karen Tam. D’origine Chinoise, elle jouait sur la reproduction de « chinoiseries » (se sont ses mots), avec des matériaux de tout les jours, façon de questionner notre rapport à l’orient et à l’intégration de ses population dans des villes cosmopolite type Montréal.
-La « Central Galerie Powerhouse » présentait FAMILY de JJ Levine, avec des photos grand format chirurgicales et des archives familiales en super 8. Très bonne surprise, probablement l’exposition qui m’a fait le plus mouliné après coup avec ses problématiques Queer et notamment la question de l’enfantement dans une cellule familiale non-traditionnelle.
-Dans le cadre d’HTMlles Festival (festival féministe d’arts médiatiques + de culture numérique), nous sommes allés au vernissage de l’exposition« CTRL + [JE] : INTIMITÉ, EXTIMITÉ ET CONTRÔLE À L’ÈRE DE LA SUREXPOSITION DU SOI » au Studio XX (dont une partie était aussi présentée à Oboro). Peu de chose à en dire, si ce n’est que les deux performances présentées, qui montrait beaucoup de travail préparatoire, manquait un peu de puissance en fin de compte.
-Enfin, deux visites au Centre Canadien d’Architecture ont érigé celui ci en meilleur musée de ces quatre mois.
La première fois, pas d’exposition principale, mais une petite exposition temporaire « 17 volcans : oeuvres de Franz Wilhelm Junghuhn, Armin Linke et Bas Princen » qui suit les traces (déssinées) d’un explorateur germano-néerlandais Franz Wilhelm Junghuhn pendant ses expéditions à Java au milieu du XIXe siècle, additionné de photos des même lieux pris récemment en très grand format.
La seconde fois, une très grande et très dense exposition « Le temps presse, une contre histoire environnementale du canada moderne » autour des questions environnementales canadiennes et surtout des multiples désastres écologique du dernier siècle. Mise en espace millimétrée et sujet passionnant, photos, extraits de reportage ou de journaux télévisés, statistiques illustrées et cartographies. L’occasion de se rappeler qu’on est vraiment en train de se mettre dans la merde de façon presque ludique.
Voila voilà. Maintenant, c’est direction Boston – Washington – New-York, pour un mois, avec comme objectif de faire un maximum de musés de la cote est des état-unis.
